La France et l’Union européenne sont face à une crise extrême, qui menace des vies humaines et neutralise un système économique mondialisé. La réponse apportée, devra démontrer son efficacité à la fois dans le temps immédiat, mais également sur les années qui viennent.
Une crise de plusieurs mois
Avec la propagation du Coronavirus, l’Union européenne est face à une crise majeure, qui durera pendant encore plusieurs mois. Les marchés européens semblent s’être stabilisés à un seuil, après les annonces de la Banque Centrale Européenne (BCE). L’efficacité avec laquelle les Etats-Unis vont gérer l’épidémie va peser sur l'évolution de l’économie mondiale. Le système de santé américain a ses particularités qui ne le rendent pas optimal, pour affronter un tel enjeu sanitaire. La seule ligne directrice qui peut conduire les actions des acteurs politiques et économiques est : A situation exceptionnelle, moyens exceptionnels. Le Président français Emmanuel Macron, a évoqué un temps de guerre, en soulignant ainsi l’absolue nécessité de se mobiliser face à un danger immédiat, pour les vies des citoyens européens. Alors qu’il s’agit d’affronter l’urgence, mais également de se préparer à une longue période de combat sanitaire, politique et économique, la situation exceptionnelle dans laquelle l’Union européenne se retrouve, exige de sortir des cadres classiques des « temps de paix » et de considérer toutes les ressources nécessaires pour vaincre. Nous ne pouvons plus envisager la formation, l’éducation, l’emploi, la vie sociale et économique, de la même manière que nous les percevons et que nous les organisons depuis la seconde moitié du XXème siècle. Nous entrons dans une nouvelle réalité historique, politique et économique. La victoire des européens sur l’épidémie et la crise économique qui en résulte, dépendra de leur capacité à s’adapter et à innover.
Une stratégie pour 10 ans
L’Europe bénéficie d’importants leviers, afin de réorganiser son système économique et de protéger ses activités ainsi que ses emplois. Il est possible pour les européens d’adapter efficacement leurs méthodes de travail et de formation, dans le but de remplir l’essentiel de leurs objectifs. Ce processus a débuté, il devra encore devenir plus performant, avec une réelle maîtrise des techniques existantes. Le changement qui est à l’œuvre devra s’accomplir, avec une projection sur les dix prochaines années. L’Union européenne a besoin d’un plan stratégique, sur 10 ans, pour affronter cette nouvelle crise et protéger les générations futures. Il s’agira de configurer les prochaines réalités professionnelles, économiques et sociales, ainsi que les modèles d’organisation humaine qui les accompagneront. Nous avons besoin de mobiliser les investisseurs et les circuits de financements, en associant la jeunesse, afin de concevoir le monde économique qui devra émerger après la crise. Organisons un Conseil de Défense européen, qui mobilise toute la société civile à l’échelle de l’Union, dans le cadre d’une Assemblée ouverte, se déroulant en ligne. Nous avons sous-estimé et nous sous-utilisons encore, tous les processus qui permettent de faire vivre une démocratie en ligne. Le confinement physique ne doit pas être un confinement intellectuel et citoyen. Le premier tour des élections municipales en France a entraîné une forte abstention, qui certes a été favorisée par le contexte de l’épidémie, mais il ne s’agit pas de l’unique raison. Ce scrutin ne mobilisait pas les foules et les citoyens s’éloignent de plus en plus, de la politique traditionnelle. La presse locale qui a couvert les élections municipales n’en a pas pris la mesure et reste encore volontairement enfermée dans le cadre d’un vieux modèle. Qu’il est difficile pour les simples citoyens, de prendre la parole dans les médias officiels, d’exprimer leurs idées, quand il est question toujours des mêmes qui se croient légitimes pour parler à la place des autres. Internet, malgré ses dérives, est un modèle pertinent pour redonner vie à une démocratie qui s’épuise. L’Union européenne, depuis la chute du mur de Berlin, ne s’est pas inscrite dans une lecture stratégique du monde, mais a pleinement adhéré à la conception d’un système international figé, dans une sorte de réalité sous cloche, avant un réveil assez brutal, manifeste depuis 2016 et la politique américaine de Donald Trump. L’Union européenne a sous-estimé les dangers stratégiques qui pouvaient la menacer. Une épidémie majeure est une menace potentielle, tout aussi importante qu’un conflit militaire d’envergure. Aucun de ces enjeux n’a été correctement traité, malgré une relance récente du projet de Défense européenne. L’efficacité sanitaire de l’Europe est une priorité du moment, qui devra également se décliner sur le long terme.
La compétition militaire menace le genre humain
Nous constatons la faiblesse de l’Iran face à l’épidémie et l’absurdité des logiques de conflit, qui ont été exacerbées par Donald Trump et ses alliés moyen-orientaux. Plus les êtres humains sont en conflit les uns avec les autres, plus nous favorisons des situations d’extrême précarité et d’insuffisance sanitaire, plus nous menaçons le genre humain dans son ensemble. Plutôt que de générer des cycles de compétition militaire, il serait bien plus déterminant de construire des systèmes économique et sanitaire, réellement opérants. L’ONU est actuellement la structure la plus légitime, pour se saisir de la question, mais encore une fois, cette organisation demeure trop effacée. Sa capacité à peser dans la gestion de cette crise, sera décisive, dans le succès de la réponse qui sera apportée à l’échelle de la planète.
Florian BRUNNER
Président du Think Tank « Europe et Démocratie »